Sur la Nationale 7, de Paris à Menton
1000 kilomètres vintage, gourmands, délirants.
Elle est à la France ce que la 66 est aux USA ; la route des vacances qui emporte dans son sillage la nostalgie de l’enfance, des sixties bariolées, des nougats et des calissons, des hôtels surannés, des restaurants routiers sans chichi et des pauses-pipi. Apologie de la lenteur, elle prend le temps de sillonner les plus belles régions de France. De Paris à Menton, « qui traverse la Bourgogne et la Provence ; qui fait d’Paris un p’tit faubourg d’Valence ». Car non, ça n’a pas changé, on est décidément heureux, Nationale 7.
Slow road trip
Après avoir sombré dans l’oubli à l’ouverture de l’autoroute A7, la voilà qui se rappelle à nos tendres souvenirs. Suivant la mode de la « slow consommation », elle nous incite à prendre notre temps, à s’écarter des axes encombrés pour flâner dans les centres historiques des petites villes qui s’y appuient, goûter aux spécialités locales qui racontent chaque région traversée, rencontrer ceux qui l’ont connue et continuent à la faire vivre, rêver dans un musée, sourire à une terrasse alors que l’A7 embouteillée se rapproche un instant du bitume fatigué. Immortelle N7…
Pare-chocs contre pare-chocs, Citroën Traction et Renault R4 formaient, dès juillet, une joyeuse farandole, remplies à ras-bord de valises, de jouets de plage, d’épuisettes et de parasols, la carte routière et le guide Michelin posés sur le tableau de bord.
Effluves des sixties
La Nationale 7, bien que consacrée dès la fin du 19ème siècle, connaît ses heures de gloire dans les années 1950 et 1960, alors que les congés payés atteignent trois semaines et que les Trente Glorieuses apportent leur lot de plaisirs estivaux. Engorgée, saturée, sinueuse, parfois dangereuse, on lui pardonne pourtant tout, à cette Route des Vacances, qui achemine au soleil les estivants, déjà la tête dans le Midi, les pieds dans le sable chaud de la Méditerranée, bercés par le chant des cigales.
Quelques chiffres-clés
Longueur
996 kilomètres. C’est la route la plus longue de France. À l’époque, les automobilistes prenaient en moyenne 2 jours pour la parcourir.
De Paris à Menton
Départ : parvis de Notre-Dame (km 0)
Arrivée : frontière italienne de Menton (km 996)
5 régions
Île-de-France, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur
15 départements
Paris, Val-de-Marne, Essonne, Seine-et-Marne, Loiret, Nièvre, Allier, Loire, Rhône, Isère, Drôme, Vaucluse, Bouches-du-Rhône, Var, Alpes-Maritimes.
Principales villes
Paris, Nemours, Montargis, Nevers, Moulins, Roanne, Lyon, Vienne (ou Saint-Étienne par la Route Bleue), Valence, Montélimar, Orange, Avignon, Aix-en-Provence, Cannes, Nice.
1000 bornes d’histoire
Colonne vertébrale de la France, elle s’évade de la capitale pour atteindre le Sud, serpentant le Val de Loire, enjambant le Rhône, traversant la Provence pour arriver sur la Côte d’Azur.
Dans son sillage, 6000 ans d’histoire, des voies romaines à la construction des premières autoroutes ; elle a vu passer les grandes invasions, a conduit les rois de France avant de s’effacer, en certains endroits, sous le bitume pressé de l’autoroute, dès 1956, qui signera son abandon progressif.
Mais elle n’a pas dit son dernier mot, cette Nationale 7 poétique et mélancolique. Sur son tracé, les passionnés entretiennent sa mémoire. De musées spécialisés en brocantes, de relais routier en auberges historiques. Et c’est cette histoire que nous allons vous raconter…
Comment suivre la N7?
En 2006, un décret déclasse le réseau routier national. Ainsi, seuls 40% de la RN7 sont aujourd’hui maintenus. Les autres tronçons, rétrocédés aux départements, ont été renommés et re-numérottés. En hommage à la route mythique des vacances, nombre de départements ont cependant veillé à maintenir le chiffre 7 dans leur nouvelle appellation.
Si vous êtes équipés d’un GPS, nous vous recommandons de sélectionner, dans les paramètres de navigation, les évitements des autoroutes et autres routes à péage, et d’avancer en sélectionnant les localités les unes après les autres au fil de votre périple. Dans presque tous les cas, c’est la N7 (peu importe sa nouvelle appellation) qui sera suggérée.
Astuce : cherchez les platanes ! Bien qu’ils tendent à disparaître, ces allées ombragées majestueuses continuent, par endroits, à border la nationale 7.
Guide de voyage
La N7 en 4 étapes
Du point zéro de toutes les routes de France, sur le parvis de Notre-Dame à Paris, la Nationale 7 met du temps à quitter l’agglomération urbaine. Après avoir frôlé le Marché de Rungis, s’être enfilée sous l’aéroport d’Orly et avoir longé la Ville Nouvelle d’Évry, la voilà qui prend ses quartier de campagne en s’engouffrant dans la Forêt de Fontainebleau, nimbée des fantômes de l’École de Barbizon. En entrant dans le Loiret, elle franchit ses premières 100 bornes en filant devant la Chapelle Notre-Dame de la Route.
Le spectaculaire cinéma art-déco Éden de Cosne-Cours-sur-Loire a les pieds dans les ceps du « Pouilly Fumé ». Plus loin, le Relais des 200 bornes marque le quart du voyage tandis que, longeant les rives de la Loire, défilent hôtels-restaurants gastronomiques et motels vintage aux accents US. À Moulins, le souvenir de Coco Chanel hante les vieilles pierres et, à Saint-Loup, le relais sixties de la Route bleue offre un décor délicieusement suranné.
Ruines et fresques murales défraîchies se succèdent jusqu’à Roanne, d’où la Route Bleue file plein sud jusqu’à Saint-Étienne. Au Col de la République, nous atteignons le point culminant de notre itinéraire. Après avoir franchi l’Isère, c’est le sud et le chant des cigales. Nougats de Montélimar, musée de la Nationale 7 à Piolenc, vestiges romains à Orange jusqu’à Avignon, abritée derrière ses remparts qu’effleure la N7.
La N7 revêt sa tenue de carte postale. Aix-en-Provence, la Montagne Sainte Victoire de Cézanne, jusqu’au Var. Les ruelles étroites gardent le souvenir de bouchons interminables mais ouf, la Méditerranée est juste là, à Fréjus. La Corniche d’Or, l’une des plus belles routes de France, rejoint Cannes, Nice, leurs paillettes et leurs palaces. Après quelques panoramas sur Monaco hérissée de gratte-ciels, arrive Menton. Plus loin que le poste-frontière du Corniaud, c’est l’Italie et la fin de notre périple.
Note : Le tracé original passait par Lyon mais dès 1933, un tracé alternatif (« La Route Bleue »), plus rapide, transite par Saint-Étienne et la jolie région du Pilat. C’est cet itinéraire-ci que nous vous proposons de suivre ici.
Lectures de voyage
C’était la nationale 7 de Thierry Dubois
Le spécialiste recense dans cet ouvrage ses 15 ans de passion pour la N7, des centaines de témoignages, des milliers de photographies – dont 650 d’époque – et une soixantaine de dessins originaux.
Éternelle Nationale 7 de Jean-Paul Naddeo et Marie Sophie Chabres
Un voyage en photos pour plonger dans chaque région traversée, son histoire, ses caractéristiques culturelles et historiques. Gros plans sur les spécialités gastronomiques qui jalonnent le tracé.